vendredi 2 décembre 2011

La sous-traitance en cascade en SSII : quels sont les risques ?

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Quels sont les risques de la sous-traitance ? Ses abus ? Qui est concerné ? Pourquoi les SSII restent muettes sur le sujet ? Le point avec les acteurs en présence.
Réalisé par Virgile Juhan, Journal du Net

Sous-traitance en cascade dans les SSII : "la situation des freelances s'est dégradée"

"Quand les SSII ne trouvent pas dans leur effectif les profils correspondant à la demande du client, il leur arrive d'employer, à la journée, pendant quelques jours ou plusieurs mois, des indépendants", a pu constater Patrick Van Straaten, bien placé pour évoquer cette réalité qu'il connaît bien. Freelance depuis 1998, cet informaticien gère également le site iDirect, une place de marché qui met justement en relation indépendants et donneurs d'ordres.

C'est d'ailleurs par ce site que Patrick Van Straaten a pu réaliser, il y a quelques mois, un sondage inédit auprès d'une centaine de ses utilisateurs, pour essayer de faire la lumière sur une réalité très difficile à chiffrer. Si l'étude n'a pas de valeur scientifique, elle a néanmoins le mérite d'avoir pu dégager trois tendances saillantes et parfois problématiques pour les freelances.

 Ainsi, il est apparu que les missions obtenues par les indépendants utilisateurs du site iDirect était majoritairement obtenues au travers d'un intermédiaire (66.46% des répondants). Mais, la sous-traitance en cascade avec plusieurs intermédiaires, est bien une réalité pour près d'un sondé sur cinq : 18.17% des répondants indiquent en effet avoir "deux intermédiaires ou plus" dans le cadre de leur mission. Une proportion qui est en croissance, estime Patrick Van Straaten.

  Plus du tiers des freelances sont présentés au client final comme des salariés de la SSII (35.73%). "Mais, c'est le service informatique du client final qui, le plus souvent, connaît le statut réel du freelance, pas le service achat", précise néanmoins Patrick Van Straaten.

  La marge moyenne des intermédiaires a été évaluée par l'étude à 27,48%. Reste qu'il faut nuancer la pertinence de ce chiffe, car les indépendants n'ont pas toujours accès à cette information. Cependant, Patrick Van Straaten témoigne qu'un de ses collègues, utilisateur du site, expert en ERP, a pu s'apercevoir qu'une SSII avait vendu sa prestation deux fois plus chère que le tarif initialement convenu entre lui et l'intermédiaire.







Certaines SSII seraient moins tentées que d'autres par la sous-traitance en cascade


Quelles SSII pratiquent la sous-traitance en cascade ? Sur les dix ou quinze premières SSII en France, Patrick Van Straaten estime que "c'est le cas d'absolument toutes". Selon cet informaticien, "au minimum" 15% des missions des SSII s'appuieraient, au moins en partie, sur des indépendants.

Pour recouper ce chiffre, le JDN a souhaité interroger le Syntec Numérique, qui n'a pas voulu s'exprimer sur le sujet. Guy Mamou-Mani, son président, n'a pas voulu répondre à nos questions, pas plus que le responsable du recrutement de la SSII qu'il dirige, Open. Même son de cloche chez Neurones ou Helpline, qui n'ont pas souhaité répondre à nos questions

Pourquoi un tel tabou ? A en croire le syndicat Munci, la pratique connaîtrait des dérives et exposent les indépendants, mais aussi les missions, à certains risques.

Le Munci dénonce des "marges excessives sans valeur ajoutée"


Ce que dénonce d'abord Régis Granarolo, directeur général et fondateur du Munci, c'est la marge excessive réalisée par les intermédiaires, "largement supérieure à ce qui peut être observé dans d'autres secteurs d'activité, comme l'immobilier ou le conseil par exemple".
"Une marge d'autant plus abusive de la part des SSII que ces dernières n'apportent parfois aucune valeur ajoutée, en termes de gestion de projet notamment. Or sous-traiter n'est pas la même chose qu'apporter une affaire, les relations et les contrats ne sont pas les mêmes, il ne faut pas confondre", fait valoir le responsable du Munci.


Steria "sceptique" devant de telles accusations

Emmanuelle Pays, directeur Recrutement, Diversité & Développement Ressources Humaines chez Steria France, a accepté de répondre à nos questions, en voulant cependant bien préciser au préalable qu'elle ne n'exprimait pas au nom de tout le secteur et que "son service n'était pas en charge de ces questions de sous-traitance, qui incombent plus au staffing ".

Ces supposées "marges abusives" laissent Emmanuelle Pays très sceptique. Soulignant que les SSII et leur marché "ont beaucoup mûri" dernièrement, elle rappelle également que "leurs prix se doivent de suivre la loi de l'offre et la demande".
Ainsi, "pratiquer des tarifs au-dessus du marché n'est tout simplement pas concevable, notamment compte tenu de la tension qui s'est exercée dernièrement sur les tarifs. Or depuis 5 ou 6 ans, cette tension croissante a fait fondre les marges, moins importantes que par le passé. Enfin, les acheteurs connaissent les prix, et savent d'ailleurs très bien en jouer lors des négociations", rétorque-t-elle.

patrick van straaten, freelance en charge de la place de marché idirect.
 
Patrick Van Straaten, freelance en charge de la place de marché iDirect. © P. Van Straaten
 
Emmanuelle Pays souhaite également faire remarquer que "des acteurs généralistes qui répondent tous azimuts à tous les appels d'offres, cela n'existe plus : les acteurs se sont spécialisés, comme Steria l'est par exemple dans la monétique". Ainsi, la nécessité de recourir à des prestataires indépendants serait moins fréquente, à en croire cette responsable recrutement.

Enfin, quant au manque de valeur ajoutée apportée par la SSII dans le cas de sous-traitance, Emmanuelle Pays explique que "ce service de mise en relation ne fait partie des services de sa SSII et en déduit que sa société, ne peut être concernée par de telles pratiques. Enfin souhaite-t-elle aussi faire valoir, Steria réalisant principalement des missions de longue durée et sachant "anticiper les besoins", elle serait moins exposée que d'autres SSII à la tentation de la sous-traitance en cascade.

Les dangers de la sous-traitance en cascade

La "marge excessive" des SSII n'est cependant pas la seule "interférence abusive" dénoncée par Régis Granarolo, qui souligne également de possibles problèmes dans la gestion du projet et la dilution de la responsabilité. Le Munci a d'ailleurs dressé une liste des dangers exposant SSII, indépendants et même clients finaux dans le cadre d'une sous-traitance en cascade.

Une maîtrise d'œuvre problématique

régis granarolo, a fondé le munci en 2003. il en est le directeur général depuis
 
Régis Granarolo, a fondé le Munci en 2003. Il en est le directeur général depuis 2008.  © Munci
 
Dans cette liste figure notamment "la perte possible d'autonomie dans la maîtrise d'œuvre" notamment due à un pilotage confus de la mission. Qui doit guider ? "La SSII peut-elle donner les ordres quand elle n'apporte aucune valeur 'travail' ?", s'interroge Régis Granarolo.

Autre danger sur lequel le Munci souhaite attirer l'attention : "la dilution des responsabilités avec l'intermédiaire, c'est-à-dire, l'entrepreneur principal, surtout en cas d'intermédiaires multiples" ou encore "le risque de captation de la propriété intellectuelle".
"En effet, l'indépendant pourra être amené à, par exemple, écrire du code dans le cadre de sa mission et il est possible que la SSII devienne ensuite propriétaire de ce code", détaille le fondateur du Munci.

Emmanuelle Pays reconnaît qu'il peut "sans doute" y avoir des écarts, mais plutôt à la marge, et chez "de petits prestataires". En effet, selon elle, les ténors du service et de l'intégration informatique, "compte tenu de leurs missions, de la manière dont elles sont encadrées, sérieusement, mais aussi de leurs clients et de leurs enjeux, ne peuvent se permettre de telles pratiques".

Améliorations en vue ?

Patrick Van Straaten souhaite de son côté avant tout que la situation ne perturbe pas trop le marché des indépendants et leurs tarifs. "Il serait dommage que le bon rapport qualité/prix des indépendants, qui n'ont pas de frais de structure, ne se maintienne pas", explique le freelance, qui trouve parfois difficile de constater "les marges du sous-traitant progresser quand le prix du freelance a été significativement négocié à la baisse".

"Il faudrait déjà commencer par respecter la loi existante"
"L'assainissement de cette situation parfois préjudiciable aux indépendants dépend de la sensibilisation de la direction générale et du service achat, qui n'a, hélas, pas l'habitude d'acheter des prestations informatiques", remarque Patrick Van Straaten.

"Avant de penser aux futures améliorations possibles, il faudrait déjà commencer par respecter la loi existante", met en garde de son côté Régis Granarolo, qui souhaite rappeler que l'article 3 de la loi de 1975 sur la sous-traitance (cf. page suivante) "oblige la SSII à informer le client final des sous-traitants qu'elle va employer "

"Or l'étude d'iDirect révèle que plus d'un tiers des indépendants employés dans le cadre d'une sous-traitance ne sont pas présentés comme tels. C'est un gros risque juridique supplémentaire", alerte Régis Granarolo. Ce dernier informe également qu'une nouvelle loi, votée en juin dernier, punit d'une amende de 7 500 euros l'intermédiaire qui ne déclare pas les sous-traitants aux clients (voir page suivante également).

En savoir plus

A lire ailleurs
Loi numéro 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance.
Article 3. "L'entrepreneur qui entend exécuter un contrat ou un marché en recourant à un ou plusieurs sous-traitants doit, au moment de la conclusion et pendant toute la durée du contrat ou du marché, faire accepter chaque sous-traitant et agréer les conditions de paiement de chaque contrat de sous-traitance par le maître de l'ouvrage ; l'entrepreneur principal est tenu de communiquer le ou les contrats de sous-traitance au maître de l'ouvrage lorsque celui-ci en fait la demande."

Loi numéro 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité.
Art. L. 8271-1-1. ? "Les infractions au premier alinéa de l'article 3 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance sont constatées par les agents mentionnés à l'article L. 8271-1-2.Ces infractions sont punies d'une amende de 7 500 euros."

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http://www.journaldunet.com/solutions/emploi-rh/sous-traitance-des-ssii/?f_id_newsletter=6062&utm_source=benchmail&utm_medium=ML7&utm_campaign=E10212119&f_u=23951499

1 commentaire:

  1. Je suis actuellement employé par expectra, qui revend mon contrat à la SSII Savane qui revend mon contrat à BT, client final (ricard) facturé 2900€ net, mon salaire ?
    1200€ net, c est qui les escrocs là ?
    Comment est ce possible ds un pays qui se prétend "social" ?

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