Avec Passbook, Apple propose d'embarquer dans une
seule application cartes de fidélité, billets de spectacles ou de
transport. Un moyen de proposer ensuite le paiement via l'application.
Un procédé qui fera ses preuves ?
Entretien avec Gilles Blanc, Directeur d'Etudes chez CCM Benchmark Group, qui a publié récemment une
étude sur le paiement mobile en France.
L'Atelier : Lorsque l'on voit Passbook, peut-on dire qu'allier
différents services est ce qu'il manque au m-paiement pour fonctionner
?
Gilles Blanc : Payer par mobile n'est pas encore un réflexe
pour les consommateurs. Il faut les convaincre, notamment par des
services spécifiques qui peuvent faire la différence. Une différence
économique, d'abord, que peut apporter le mobile, par exemple avec les
prix. Mais également une logique de programmes de fidélité qui dépassent
les programmes des points à collecter pour avoir un cadeau. Ce qui
compte, par exemple, ce sont les programmes cross-canal qui fonctionnent
pour l'achat à distance, sur mobile ou en magasin. Mais également entre
les enseignes, ce que l'on observe avec les smiles.
Et puis, il y a la question de la sécurité ?
Tout à fait, car celle-ci, pour le paiement mobile, doit être
supérieure ou au moins égale à celle de la carte bancaire. Par ailleurs,
concernant Passbook, il est vrai que le consommateur n'aime pas avoir
plein de cartes. Aussi, si l'application permet de reconnaître
automatiquement la carte et apporte de vrais avantages comme des bons,
c'est très bien. Et puis, cela peut sembler secondaire, mais un deuxième
code confidentiel, comme le fait Paypal avec un mot de passe personnel,
est considéré comme une garantie de sécurité supplémentaire. Ceci dit,
il reste le problème de la légitimité.
A savoir qu'Apple pourrait n'être pas forcément le bon acteur ?
Effectivement. La première problématique du m-paiement est liée aux
acteurs, car l'écosystème est large. Dans notre étude, nous avons
interrogé les consommateurs sur la légitimité de ces différents acteurs.
Et l'on remarque que la confiance est d'abord donnée aux banques
traditionnelles qui sont considérées comme légitimes. Viennent ensuite
les émetteurs de carte, ou encore les opérateurs de télécommunication,
et seulement les pure players, comme iTunes. Mais la confiance donnée à
ces derniers pour gérer un portefeuille est très faible. Pour donner un
exemple, 72% des consommateurs ne font pas confiance ou accordent une
faible confiance à ces pure players. Alors que seulement 15% des
consommateurs se positionnent de la même façon pour les banques ou les
émetteurs de carte.
Qu'est-ce que cela signifie pour Apple ?
Cela signifie que, malgré l'attrait que pourrait apporter
l'application, la partie paiement mobile pose le problème de la
légitimité. Car évidemment un acteur comme Apple est bien positionné,
mais il n'a pas la meilleure position. Et cela est également le cas des
enseignes qui se méfient à l'idée d'être « absorbées » par une telle
marque. Sa plate-forme risque donc de n'attirer que les clients fidèles
et utilisateurs de smartphones habitués du m-paiement. Pour changer
cela, il serait peut être nécessaire de s'associer avec des institutions
financières pour gagner cette légitimité.