mardi 19 juin 2012

"Le Quantified Self, c'est remettre l'informatique au service de la personne"

A lire sur:  http://www.atelier.net/trends/articles/quantified-self-remettre-informatique-service-de-personne

Par Mathilde Cristiani 19 juin 2012 Emmanuel Gadenne
L'automesure ne devrait pas rendre l'individu esclave des données sur lui, mais le faire entrer dans une boucle d'autonomisation.
Entretien avec Emmanuel Gadenne, manager chez Sopra Consulting et auteur du livre Le Guide pratique du Quantified Self*.

Est ce que les applications de Quantified Self liées au mieux vivre répondent à un manque dans l'offre de santé ?

Pas forcément à un manque, mais cela rajoute un maillon. En France, on peut ainsi se demander pourquoi est-ce qu'on attendrait plusieurs mois d'avoir enfin rendez-vous avec un médecin spécialisé pour avoir des données qualitatives sur son sommeil, par exemple, quand des outils - simples ou plus complexes - permettent de les obtenir ? Certains pays sont plus en avance que d'autres par rapport à cela. En Europe, au Royaume-Uni, par exemple, la National Health Service recommande aux médecins de prescrire des applications de santé à leurs patients. Une liste de 500 applications recommandées devrait même être mise à leur disposition.

En utilisant une multiplicité de capteurs et d'outils de partage et d'analyse de données sur soi, ne risque t-on pas de verser dans une forme d'hypocondrie high-tech ?

Non, il s'agit simplement de remettre l'informatique au service de sa personne. D'ailleurs un synonyme du Quantified Self est le Personal Informatics. Pour beaucoup de personnes, il va s'agir de profiter de conseils personnalisés et adaptés comme elles pourraient en bénéficier si elles payaient un coach. En relevant des informations sur soi, en les analysant, en les partageant et en discutant avec ses pairs, on entre dans une boucle d'autonomisation.

Les contours du mouvement ne sont pas encore définis. Mais je ne pense pas que l'on sera dépassé par les données. Au bout du compte, c'est toujours l'utilisateur qui définit les objectifs, les chaînes d'efforts. Les outils servent à aider des personnes qui se sont donné des consignes et qui ont besoin de se positionner avec des outils.

Vous parlez de partage. Là encore, question de culture, mais culturellement, les Français n'ont pas la même approche du partage des données que les Américains par exemple. Est-ce que cela ne risque pas de freiner certains usages du QS ?

C'est vrai qu'il y a encore deux ans, le QS était vraiment pour les ultra geeks. Mais avec des appareils comme FitBit par exemple, qui est maintenant vendu dans des grandes enseignes, cela est en train de changer. En effet, c'est à l'utilisateur de choisir ce qu'il souhaite partager ou pas, et avec qui. La simplicité de l'outil peut accélérer l'adoption d'un usage et l'acceptation de ses composantes.

L'autre chose, c'est que le Quantified Self va pour moi de paire avec le partage. On a besoin du regard des autres quand on mène un projet. Et puis avec les réseaux sociaux, nous avons déjà accepté de livrer beaucoup d'informations sur nous. Ce qui est sûr, c'est que nous avons perdu beaucoup de temps avec les réseaux sociaux, finalement. Maintenant, on va pouvoir partager des données ayant plus de valeur ajoutée, avec des personnes choisies qui y accorderont de l'intérêt, et avec qui il sera possible d'échanger sur du qualitatif : synthèse de ses performances, bonnes pratiques, enseignements...

*Paru chez FYP éditions

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