08/07 | 15:40 | mis à jour à 18:09 | Les Echos
Dossier : La Poste en pleine mutation
Déclin du courrier, poids croissant des activités financières, lancement d'une offre de téléphonie mobile... La Poste, qui a aussi changé de statut en 2010, se transforme en profondeur. Retour sur ces évolutions pas toujours bien vécues par les postiers.
De l'établissement public à la société anonyme
Le 1er mars 2010 marque un tournant pour La Poste: l'établissement public, présidé par Jean-Paul Bailly, devient officiellement une société anonyme. Ce changement de statut, voulu par le gouvernement mais qui a rencontré une vive opposition de la gauche, vise à «préparer le groupe à l'ouverture totale à la concurrence à partir de janvier 2011». Le ministre de l'Industrie, Christian Estrosi, certifie à ses détracteurs que l'opérateur historique du courrier en France restera une entreprise publique, avec l'Etat comme actionnaire minoritaire, et ne sera pas privatisé. Cette réforme s'accompagne pour La Poste d'une augmentation de capital de 2,7 milliards d'euros, dont 1,5 milliard provenant de la Caisse des Dépôts et Consignations et 1,2 milliard venant de l'Etat. L'objectif est de renflouer le groupe, endetté à hauteur de 5,7 milliards, et de lui permettre de prendre un nouveau départ (photo: Miguel Medina/AFP).
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Le courrier, activité historique, en déclin
Car La Poste souffre. Son activité historique, le courrier, décline. Et dans les années à venir, elle risque d'être mise à rude épreuve du fait d'Internet, qui devrait entraîner une chute de 30% des volumes transportés entre 2008 et 2016. L'ouverture totale du marché du courrier à la concurrence au 1er janvier 2011 (et plus seulement vers l'international), constitue aussi une menace, mais semble-t-il de faible ampleur. Pour l'heure, en effet, aucune entreprise d'envergure nationale n'est prête à se lancer dans l'aventure. «Personne n'a envie d'attaquer un acteur dominant alors que le marché est en déclin structurel», résume Frédéric Pons, le président d'Adrexo. Cependant, certaines pourraient se positionner sur des niches lucratives (photo: Eric Piermont/AFP).
A l'été 2010, La Poste se fait taper sur les doigts par la Cour des comptes. Celle-ci estime que le groupe a trop investi dans le courrier et n'a pas, au contraire, «concrétisé toutes ses ambitions de croissance dans les autres métiers», à savoir le colis et la banque. Ceux-ci sont pourtant au coeur du plan stratégique du groupe. Les sages de la Rue Cambon considèrent également que La Poste devrait mettre fin au J+1 universel pour la distribution du courrier, qu'elle peine à respecter à 100%. Le groupe s'y résout en mai 2011: une partie du courrier sera désormais livré à J+1 après avoir été posté, et l'autre à J+2. Une façon aussi, assure-t-il de «réduire son empreinte écologique».
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Le colis en plein essor
Le commerce en ligne, qui monte en puissance, entraîne dans son sillage le marché du colis qui attise bien des convoitises. La Poste reste le leader incontesté du secteur, mais est cependant défiée par d'autres entreprises. Fin 2010, TNT et Adrexo Colis annoncent ainsi leur rapprochement. En mai 2011, La Poste, qui négocie un partenariat avec Mondial Relay, la filiale de livraison en point relais du groupe 3 Suisses International, se fait taper sur les doigts par l'antitrust français qui la soupçonne de vouloir fragiliser la concurrence en s'alliant avec ce puissant opérateur privé. La bataille se joue aussi sur l'offre. Pour conserver son avance, La Poste multiplie les solutions de livraison, avec des services sur mesure comme So Colissimo (photo: Eric Piermont/AFP).
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La banque, nouvelle locomotive
Tandis que le courrier décline, les services financiers de La Poste montent en puissance. En 2015, 77% du bénéfice opérationnel de La Poste devrait ainsi provenir de La Banque Postale (qui rassemble moins de 10% des effectifs du groupe), contre environ 6% pour le courrier et 17% pour le colis express! Les objectifs de croissance de La Poste reposent donc beaucoup sur ses activités bancaires, au centre de son nouveau «business model». L'élargissement de la gamme de produits de La Banque Postale, qui, depuis 2009, a le droit de jouer à armes égales avec ses concurrents, devrait lui permettre d'asseoir sa croissance (photo: Mychèle Daniau/AFP).
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Une diversification dans le mobile
Face au déclin du courrier, La Poste cherche des relais de croissance. En mars 2010, elle annonce qu'elle va lancer une offre de téléphonie mobile sous sa propre marque, plus simple et meilleur marché que les offres existantes, en devenant un opérateur mobile virtuel (MVNO). Et en décembre, elle dévoile son alliance avec Debitel, filiale à 40% de SFR et également MVNO. Debitel va mettre sa plate-forme de distribution et de facturation à la disposition de l'entreprise publique et lui fera partager son savoir-faire. En échange, il profitera du réseau de distribution sans équivalent sur le territoire de La Poste (près de 17.000 points de contact) et de sa marque. Fin mai 2011, La Poste Mobile lance finalement son offre, avec des tarifs qu'elle estime «agressifs», d'abord dans une centaine de bureaux. L'objectif du groupe postal est d'acquérir de 2 à 2,5 millions de clients à l'horizon 2016. Un chiffre ambitieux, puisque, à fin 2010, le marché de la téléphonie mobile virtuelle n'a attiré que 3,6 millions de clients (photo: Eric Piermont/AFP).
La Poste veut lancer sa propre marquede téléphonie mobile [ 08/07/2011 ]
«Malaise social» au sein du groupe
La mutation de La Poste n'est pas sans conséquence sur ses salariés qui doivent s'adapter sans cesse aux changements. D'autant qu'elle s'accompagne d'une réduction drastique des effectifs: près de 11.700 postes ont été supprimés en 2010, du jamais vu! Et de 2004 à 2010, le nombre d'agents est passé de 280.800 à 236.930. Pour les syndicats, cette cure d'amaigrissement, même si elle ne passe par aucun plan social (mais par le non-remplacement des départs à la retraite), provoque «un vrai mal-être au sein des postiers, de plus en plus soumis à des cadences infernales».
La hausse du nombre de journées d'absence pour accident de service ou pour maladie et même la multiplication des cas de suicide semble l'attester, même si la direction du groupe le conteste. Dans une interview aux «Echos», le sociologue Norbert Alter souligne la nécessité de «reconnaître la réalité du travail fourni par les salariés» pour éviter leur désengagement, «qui peu se traduire par le conformisme, l'absentéisme ou des risques psychosociaux». Le 29 mars (photo: Pierre Andrieu/AFP), les postiers manifestent un peu partout en France pour dénoncer ce fameux «malaise social». La direction, qui a annoncé peu avant 4.000 embauches et la création de délégués locaux d'établissement, n'a pas réussi à désamorcer les tensions.
La Poste : les syndicats veulent mobiliser pour dénoncer le «mal-être» social (29/03/2011)
DOSSIER PRÉPARÉ PAR ELSA DICHARRY
http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/service-distribution/dossier/0201497366203-la-poste-en-pleine-mutation-191904.php?xtor=EPR-1500-[la_une_soir]-20110711-[s=461370_n=3_c=305_]-361033@1
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